Presse

Terrifiant :13000 amputations!!! 

Les ravages sur la santé  des produits en fibres synthétiques  : chaussures, vêtements, couvertures,etc. Le synthétique contient de l'électricité statique qui perturbe la circulation du sang particulièrement celle des enfants et des hypertendus, empêhce la peau de respirer ce qui donne de graves infections dermiques et des palpitations cardiaques. Beaucoup préfèrent la frippe (interdite, en Algérie mais pas à Paris)  dont les produits sont en laine et en coton (donc meilleurs pour la santé)  que ces produits importés dangereux. D'ici là que l'industrie nationale textile et cuir décolle (au moins 10 ans ) et puisse satisfaire l'énorme demande nationale, il y aura des milliers de morts et d'handicapés. Dans un pays qui dispose à profusion de la laine de mouton  pourquoi ne pas faciliter l'octroi de crédits ANSEJ aux femmes pour qu'elles se remettent à tisser des couvertures et tricoter des pulls? Pourquoi ne pas relancer les usines de tissage? A condition que le secteur médical et les associations de consommateurs jouent le jeu en donnant de bons conseils aux usagers.   

Ce sont 13 000 amputations des membres inférieurs opérées en l’espace de deux ans. C’est bien là le chiffre effarant des victimes de la chaussure chinoise qui, malheureusement, continue à inonder le marché algérien. La source médicale, qui rend publique cette pénible situation, précise que le ce chiffre avancé ne concerne que les malades diabétiques dont les infections dues aux allergies déclenchées par les matériaux utilisés dans la confection des chaussures incriminées ont aggravé les complications au stade de l’amputation.
Autrement dit, bien d’autres citoyens certainement aux moyens modestes contraints à s’habiller et se chausser petitement ont développé des maladies qu’ils doivent gérer. Ils doivent donc ouvrir un autre chapitre douloureux dans leurs dépenses déjà inconciliables avec leur pouvoir d’achat. Les caisses de Sécurité sociale auront à subir des dépenses. Mais, qu’importe le coût puisque c’est le même contribuable qui paie la note. Pourtant, la gravité d’une telle annonce n’a entraîné aucune réaction et encore moins de sanction à quelque niveau que ce soit. C’est le silence total qui traduit toute l’indifférence réservée au bien-être du citoyen. Un silence complice garant de la protection dont jouit le monde des affaires où l’argent est sublimé.
Dans ce cas de figure, qui doit-on incriminer ? Les Chinois qui nous fourguent des marchandises n’obéissant à aucune norme d’hygiène et de sécurité ?
Aux importateurs algériens responsables du choix de la qualité des produits sur lequel est basée toute leur stratégie de gain rapide ? Ou alors aux différents services publics, censés protéger le consommateur, qui ne s’acquittent pas de leur mission ? Si la morale condamne sur un pied d’égalité toute cette chaîne d’intervenants, il n’en demeure pas moins que la responsabilité est totale pour les auteurs et les commanditaires d’un tel business. Ces derniers sont conscients de la détresse sociale de leurs concitoyens et s’ingénient à l’exploiter pour en tirer un maximum de profit : de l’argent pour les uns et la paix sociale pour les autres.
En dehors de cette connivence d’intérêt, il sera alors difficile au commun des mortels de saisir la pérennité et la stabilité dont jouit un tel commerce ravageur sans que les services sanitaires et autres structures de contrôle de la qualité des produits marchands interviennent dans le cadre de la mission qui leur est dévolue. Certainement, il n’y a pas que la chaussure qui blesse les Algériens, mais espérons, toutefois, que l’affaire, la grande, aura un jour une fin.Ali Guissem dans elwatan du 26/12/2011
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Histoire de la presse mondiale

Etude élaborée pour le Directoire presse et communication comme membre de l’équipe chargée du projet : Elaboration d’un projet de développement de la presse publique. 2005

                          Souâd KHODJA , consultante



S O M M A I R E


Introduction

1.       La naissance des gazettes en Europe

1.       La presse en France et en Amérique aux 18ème  et 19ème siècle

2.        Le développement de la presse aux USA et en Europe au 20ème siècle

2.1   Le développement de la presse en Europe
2.2   Le développement de la presse aux USA

3.       La presse contemporaine

3.1   La presse française
3.2   La presse étasunienne
3.3   La presse anglaise

4.      La presse et son lectorat, aujourd’hui

5.      Le financement de la presse

6.      La presse dans les pays en voie de développement

7.      La presse en ligne

Conclusion

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Introduction 


Beaucoup de commentateurs s’accordent à dire que si on veut connaître un pays,  il faut lire sa presse. Et si on veut bien le connaître, il faut aussi lire l’histoire de celle-ci, tant le parcours  de ces annales est fascinant. Témoin privilégié de l’évolution quotidienne et diversement commentée d’une société, le journalisme renvoie,  d’une façon presque palpable, l’image de la perception du monde par  celle-ci ainsi que la manière dont elle est conduite .

De passage en Californie en 1986, le journaliste  Bussière, le prix Pulitzer, se demandait ce qu’il pouvait ramener de son voyage qui puisse constituer un souvenir significatif. Il opta pour l’achat d’un quotidien car dit-il, le journal a pour mérite de répondre à plusieurs objectifs : peu cher, témoin du moment du passage, source d’informations sur la culture, les événements, la façon d’être gouverné et de vivre, disponible, facile d’accès, occupant peu d’espace.

La presse a dès sa première apparition captivé certains écrivains. Ainsi, des grandes plumes de la littérature française ont été aussi des journalistes ; citons parmi ceux-là  des auteurs comme Gérard de Nerval et Théophile Gautier. Rappelons aussi certaines œuvres littéraires qui ont eu pour thème la presse, tels que Les français peints par eux mêmes de Jules Janin, paru en 1840 et Monographie de la vie parisienne de Honoré de Balzac, publié en 1842, l’auteur ayant été lui même chroniqueur de presse.

Parole du quotidien d’un pays, cette mémoire vivante permet d’en appréhender la culture, les relations entre les citoyens et entre ceux ci et leur gouvernement, bref son niveau de développement sociétal et politique. Ceci transparaîtra  à travers les rubriques aussi bien les plus anodines comme celles des faits divers que les plus sérieuses où l’on retrouve des commentaires souvent divergents  sur les faits politiques marquants. La diversité des rubriques, la qualité et la profondeur des analyses, le type d’événements rapportés, la liberté de ton des journalistes, le nombre d’exemplaires vendus, renseignent autant sinon plus que tout autre instrument d’observation et d’analyse sur la vie mouvante et foisonnante d’un pays.

En outre, les publications de presse, reflets d’une société et instrument d’anticipation de son avenir ont pu se transformer, dans des situations historiques données, en accélérateurs et  amplificateurs des changements socio-économiques et politiques. Autant dire que la presse permet ainsi de lire le passé, le présent et le futur probable d’un pays.

Le besoin de s’informer remonte aux aurores de l’humanité : « avant même de se tenir debout, l’homme eut besoin d’informations sur le monde qui l’entourait (…) d’une certaine manière les aèdes de la Grèce antique, les trouvères du moyen âge, les griots africains, les crieurs publics furent les ancêtres des journalistes modernes. D’abord verbale, la transmission des nouvelles a été organisée de diverses manières à travers le monde : signaux de fumée des peaux rouges, tam-tams africains, réseaux de pigeons voyageurs dans les Etats musulmans du Xème siècle ou les 200.000 coursiers de l’empereur Marco POLO, plus tard. Cinquante  ans avant notre ère, les journaux romains, acta diurna, paraissaient à 10.000 exemplaires chaque semaine»[1]

Au regard de ces considérants et si on accepte l’idée  que le journalisme représente une partie intégrante de la culture d’une nation, de son évolution politique et de son besoin naturel de communiquer, un bref parcours de son histoire peut s’avérer précieux, pour en cerner la lente et difficile évolution qui en a fait aujourd’hui  le quatrième  pouvoir. La perspective historique est essentielle et incontournable pour la compréhension des phénomènes qui unissent ou opposent les peuples, les nations, les cultures, tantôt sur une durée étendue tantôt sur le court terme.[2]


Produit des transformations politiques et culturelles,  accompagnant et accompagnée par les évolutions économique, technique et scientifique des sociétés, ce sont les découvertes dans les domaines des techniques d’impression et de  diffusion de l’information qui lui ont, aussi, conféré ses grandes heures de gloires. Mais c’est surtout la liberté d’expression, pierre angulaire des sociétés démocratiques qui lui a donné sa force et sa puissance.

Aujourd’hui, l’entrée en force dans sa gestion des magnats de la finance, fait majeur de ce début du 21ème siècle, infléchira son devenir, de façon plus ou moins heureuse, selon les pays et les systèmes politiques considérés.

Cette revisite de l’histoire de la presse n’est pas à vocation académique, cela s’entend. Sa justification se situe dans l ‘idée que dans des espaces temps différents, il est frappant de noter que les problèmes rencontrés, à travers l’histoire et partout dans le monde, sont d’une ressemblance étonnante et que les solutions apportées pour les résoudre ne sont pas aussi diversifiées  qu’on pourrait être tenté de le croire. On y apprend qu’il est peut-être nécessaire de respecter certaines spécificités mais sans trop les amplifier non plus, au risque de saper  ce qui fait le fondement même du journalisme et de voir celui-ci dépérir dans l’indifférence ou disparaître tout simplement. Ce que nous enseigne donc l’histoire de la presse c’est qu’avant de lancer un organe de presse, il faut d’abord répondre à cette interrogation cruciale : Pourquoi, comment, avec qui et pour qui ?

Ce parcours historique permettra aussi de situer la presse algérienne dans ces contextes national et international et  de comprendre ainsi le rôle qu’elle a joué dans le projet de construction d’un Etat démocratique et républicain. Il faut néanmoins noter que le savoir-faire accumulé à travers l’histoire par des générations de journalistes, partout dans le monde, a été bien utile pour la construction du paysage médiatique de la jeune presse algérienne qu’elle soit étatique ou privée. Si ce n’était que pour rappeler cette transmission, cet historique serait amplement légitimé.


La naissance des gazettes en Europe


Pour explorer  l’émergence du journalisme et lire les premiers balbutiements de la presse écrite, il faut se rendre en extrême Orient en l’an  0800  où parut le premier  mensuel de Chine, le Kai-Yuan  tsa pao. Ecrit entièrement à la main par les mandarins, il était destiné aux grands hommes de l’empire.

Ce n’est que plusieurs siècles plus tard, en 1430, que Gutenberg et Jansszoon découvrent l’impression par caractères mobiles , ce qui permit d’imprimer les publications plus rapidement et en plus grande quantité.

Parmi les premiers à recourir à cette technique, on retrouve Nostradamus qui publia son Almanach en 1550 ; nous en sommes encore aux arts divinatoires. Trois villes européennes prirent ensuite le relais. Francfort, vit la publication en 1604 du journal annuel le Mercurius Gallo belgium , suivie en 1605 par le bimensuel De Nieuwe Tijdinghen à Anvers et enfin, en 1622,  les lecteurs londoniens  eurent aussi leur hebdomadaire intitulé  Weekly news . On signale aussi qu’à la même époque,  des feuilles volantes contenant des réflexions sur la religion et la monarchie absolue, naissent au début du XVI ème  siècle.


Cependant, c’est l’année 1631 marquant la fin des guerres de religions, qui est considérée par les historiens de la presse comme un véritable tournant dans l’histoire de la presse écrite ; elle constituerait un moment déterminant dans l’apparition du journalisme moderne.

C’est en 1624, sous Louis XIII qui ambitionne de faire de la France  le 
plus grand pays d’Europe, que le Cardinal de Richelieu prend la tête du Conseil royal. Mais les oppositions internes et externes sont nombreuses et les attaques contre Richelieu sont très fortes. En 1631, il décide d’accorder le monopole complet sur la presse au médecin du roi,  Théodore Renaudot qui lance une feuille d’information hebdomadaire appelée la Gazette qui devint, alors, l’organe officieux du pouvoir. En plus des informations officielles, on pouvait y lire des critiques littéraires et artistiques et quelques potins mondains. 

Celui qui est considéré comme le père fondateur de la presse moderne fit sienne cette devise : En une seule chose ne le céderai-je à personne : en la recherche de la vérité, de laquelle néanmoins je ne me fais pas garant. Cette sentence délimite déjà l ‘étendue et les limites du champ de la liberté d’expression et soulève un débat qui est loin, même aujourd’hui, d’être définitivement tranché y compris dans les pays occidentaux où elle est considérée comme étant la plus grande. Le roi Louis XIII lui-même  ainsi que le Cardinal de Richelieu, qui deviendra plus tard proviseur de la célèbre université la Sorbonne, publiaient régulièrement et anonymement leurs pensées et réflexions dans La Gazette.

Cette publication qui vivra jusqu’en 1917 a surtout été le porte-voix officiel du roi. La régularité dans sa diffusion est une première, les lecteurs étant enfin assurés de trouver  leur journal tous les vendredis. En outre, la lecture des journaux sort des clubs de lecture réservés à des privilégiés et monsieur n’importe qui était en mesure d’accéder à des nouvelles fraîches, venues du monde entier y compris de Perse, par exemple.

Le règne de Louis XIV, par contre, ne sera pas aussi tolérant avec la presse. Beaucoup de nouvellistes qui avaient acquis une très grande liberté de ton et aussi une grande notoriété seront  enfermés à la Bastille et certains fuiront en Hollande où ils publieront La gazette ordinaire  d’Amsterdam et Le mercure historique et politique. Les thèmes favoris de ces publications seront la dénonciation du pouvoir royal.

Il faut surtout signaler le rôle considérable joué par les Lumières qui, en développant la curiosité intellectuelle et l’esprit frondeur, propagent l’esprit du libre arbitre politique dont la presse devient un canal de diffusion. Les ténors de la révolution dont Camille Desmoulins fondateur du Vieux Cordelier ont su utiliser ce moyen de diffusion de l’information et de mobilisation. A Paris même paraît en 1777 le premier quotidien, Le journal de Paris. 

Grâce à l’ouverture de ces débats politiques publics, les journalistes participeront, de façon active au renversement du trône, lors de la révolution de 1789.  Ils siégeront même au conseil des ministres de Louis Philippe qui soutint la république. On dit que c’est à ce moment là que naît ce qu’on appelle dorénavant le 4ème pouvoir. Signalons que de 1789 à 1800 pas moins de 1500 titres sont publiés dont beaucoup auront une durée de vie éphémère.

A la suite de  Renaudot,  certains analystes de la presse considèrent Girardin (né en 1806 et décédé en 1881) comme l’homme qui inventa une deuxième fois la presse et qu’il est incontestablement l’auteur de la modernisation de celle-ci.[3] Après avoir lancé le Voleur alors qu’il n’avait que 22 ans, il édita aussi La mode, Le journal des connaissances utiles, Le musée des familles, Le magasin pittoresque et Le journal des instituteurs. Son apport historique au journalisme fut l’introduction de la réclame, première forme de publicité, pour financer ses journaux dont le prix baissa de moitié. La presse lui doit aussi l’introduction du roman feuilleton, des manchettes et des gros titres.  A sa mort on écrivit sur sa tombe  cette épitaphe : Il est né journal, il vécut journal, il est mort journal.

Outre ces deux noms historiques de la presse, on peut citer quelques noms de journalistes célèbres qui ont marqué le style journalistique comme Villemessant, journaliste qui relança Le Figaro en 1856 et Millaud qui introduiront tous deux la dimension du  sensationnel dans la presse. Rappelons aussi le nom de Marinoni qui introduisit l’utilisation de la rotative.

              C’est pourquoi, le 17ème siècle est retenu par les historiens comme le moment où,  pour la première fois dans l’histoire, le métier de journaliste commença à devenir une véritable  profession. Les trois ingrédients nécessaires étaient réunis,  un style spécifique à l’écrit journalistique, le sensationnel, la publicité pour assurer le financement ainsi que la technique facilitant l’impression en grande quantité. La presse venait de naître. Ceci pour dire que le métier de journaliste a une histoire ancienne de, au moins, trois cents ans.

Le prix Renaudot sera institué en 1929, soit près de trois siècles après la rédaction du premier numéro de La Gazette. Ceci pour rendre hommage à cette date marquante de l’évolution de la presse moderne et désigner clairement ce tournant historique.

Ce que nous pouvons retenir de ce survol de l’histoire de la presse c’est qu’à l’origine sa vocation était essentiellement politique. Elle ne s’est diversifiée que très récemment  pour répondre à d’autres demandes du lectorat tels que le besoin de se cultiver, de voyager, de savoir, de se divertir. Ce qui  a permis l’apparition de journaux plus spécialisés . Seule la presse américaine, liée aux grands intérêts industriels et financiers, a vu naître dés son apparition des rubriques autres que politiques.

C’est justement cette voie qu’ont suivie les presses, italienne et brésilienne, que nous citerons comme exemples, parmi tant d’autres, pour illustrer cette conversion.

Pour tenter de comprendre  le cours pris par la presse italienne, aujourd’hui, faisons un petit détour par l’histoire. Cette démarche nous permettra de déceler comment une presse, foncièrement politique à ses origines, a été distancée progressivement par la presse people à grand tirage, aux mains des grands groupes de presse, assurant son propre financement.

Tous les grands quotidiens italiens, de portée nationale tels que le Corriere della sera , ou régionale tels que la Stampa à Turin, ont été créés à la fin du 19ème siècle. Ce sont des journaux politiques de gauche ou d’extrême gauche comme Avanti  lancé en 1896 qui paraissent les premiers, ce qui amènera la censure à sévir. Ainsi, l’édit de  mars 1848, qui renforce le contrôle de la presse, vise  l’impression et la distribution. On peut y lire ceci : Toute activité d’édition et de publication doit être enregistrée auprès des autorités compétentes. Les amendes en cas de transgression sont élevées . Cette censure sera très fortement renforcée pendant la 1ère guerre mondiale alors que la presse d’extrême droite commence à apparaître avec Il popolo d’Italia lancé en 1914 par Benito Mussolini dans l’objectif d’inciter l’Italie à entrer en guerre .

 C’est à la fin de la guerre que les journaux de droite et de gauche commencent à s ‘affronter violemment. « (…) Durant l’année 1919 , comme partout en Europe mais sûrement avec plus d’acuité en Italie, tout le pays est traversé par une contestation sociale importante. Cette montée des mécontentements s’exprime notamment par des articles enflammés : le mouvement ouvrier réclame plus de justice sociale et de meilleurs salaires, la paysannerie demande un partage plus équitable des terres, les anciens combattants revendiquent une revalorisation de leur place dans la société[4].

En conséquence et annonçant déjà la montée du fascisme, le gouvernement supprime, dés 1925, les journaux de gauche,  comme La Giustizia, l’Unita, l’Avanti, La Revoluzione Liberale, alors que les journaux de droite sont sommés de  s’aligner sur le discours officiel. Les historiens de la presse donnent la fin de la seconde guerre mondiale comme celle de l’apparition de la presse italienne contemporaine avec la configuration qu’elle présente aujourd’hui.  Nous examinerons cet aspect, plus loin, dans le chapitre réservé au financement de la presse.

Un autre exemple, celui du  Brésil où  la presse existe depuis 1808. A cette époque  La gazeta do Rio de Janeiro est  le premier journal imprimé au Brésil. Elle donne uniquement les point de vue officiels du gouvernement, le prince régent ayant décidé que toute publication devait être revue par trois censeurs royaux.

A côté de cette presse officielle, on trouve une autre presse, privée celle-ci, qui  a joué un rôle crucial dans  l’évolution de la pensée démocratique. Selon les connaisseurs du secteur, c’est grâce à elle que les Brésiliens se sont acheminés progressivement  vers l’idée de nation et de république. Ainsi, on cite souvent l’apport du Correio brasiliense,  édité à Londres. Au Brésil même paraît le journal, la Gazeta pernambucana  qui devint en 1823, un organe de protestation virulent contre le régime. Lui emboîtant le pas, le journal Sentinella da libertade na guarita défend farouchement l’idée d’une constitution libérale.  

On cite souvent le  journal Dirio do Sao Paulo qui est aujourd'hui le plus en vue politiquement et intellectuellement avec la plus grande diffusion dans le pays ; il mena une lutte acharnée pour l’abolition de l’esclavage et pour la république[5]  .

C’est pourquoi, les historiens attribuent à la presse brésilienne une contribution considérable à l’élaboration de  la loi Aurea qui abolit l’esclavage en 1888 et à l’instauration de la république brésilienne, tout de suite après, en 1889. La presse brésilienne connut alors une liberté de ton unique dans toute l’Amérique Latine. Les chercheurs s’accordent à  dire que la presse d’Amérique Latine et aussi ibérique ont été utilisées par les élites économiques, culturelles et politiques pour en faire un instrument de cohésion sociale en la mettant au service de leurs stratégies et de leurs valeurs. Bien que destinée à un public restreint , elle touche à partir de 1850 un plus grand nombre de lecteurs et connaît son âge d’or après 1900. Elle continuera à servir les intérêts des notables et de leurs partis , mais elle gagne en variété et s’affirme à la fois comme lieu central de débat social et comme facteur de diffusion des normes de comportements et mentalités des élites. [6]

Aujourd’hui, avec ses 70 titres, la presse brésilienne, tout en gardant sa combativité pour certains titres,   a elle aussi  progressivement  emprunté le chemin de la presse à grand tirage où la recherche du profit l’emporte parfois sur la recherche de la qualité . L’appropriation des titres par les grands groupes de presse est aussi une tendance qui se précise progressivement. La majorité de ceux-ci est contrôlée par le groupe Editora Abril , le géant des médias d’Amérique Latine qui détient plus de 100 titres.

Signalons dans ce paysage médiatique, le magazine Veja, lancé en 1968. Caractérisé par un style rigoureux et mordant, il occupe une place de choix parmi les cinq plus grands magazines du monde, avec ses 900.000 abonnés. Sa notoriété, c’est le journalisme d’investigation et les scoops retentissants qu’il publie régulièrement.

Pour une population estimée à 176.500.000 habitants, les tirages restent relativement moyens, la lecture des médias étant une tradition généralement réservée à l’élite des grandes villes, défendant la tendance libérale. Citons quelques uns parmi les grands titres considérés comme formateurs d’opinion et publiés principalement à Sao Paulo et Rio de Janeiro.

Ø  Rio de Janeiro où paraissent chaque jour autour de 1.500.000 exemplaires dont, essentiellement, Jornal do Brasil qui demeure le journal traditionnel de Rio  avec 325.000 exemplaires suivi par O Globo, le plus lu dans tout le Brésil avec  460.000 exemplaires et O dia  avec 500.000 exemplaires ; Monitor mercantil  est le journal des affaires.

Ø  Sao Paolo avec, elle aussi,  près de 1.500.000 exemplaires quotidiens. Citons, entre autres, Folha do Sao Paulo qui publie entre 560.000 et 1,4 millions d’exemplaires, suivi par  Estado do Brasil, avec 460.000 exemplaires et  folha da tarde avec 8O.000 exemplaires. La ville publie aussi Gazeta Mercantil,   le journal des affaires.


La presse en Amérique et en France au 18ème siècle et 19ème siècle

Dans cette saga de la presse, le nouveau monde n’est pas en reste. Les historiens considèrent que la presse américaine écrite est née en Nouvelle Angleterre en 1630. Mais ce n’est que plus tard au 18ème  siècle que la presse américaine commence  à émerger réellement. Le premier journal publié régulièrement en 1704 est le Québec chronicle-telegraph . En 1728, Benjamin Franklin, lance la Pennsylvanie gazette. Le troisième plus ancien journal est le Hartford-Courant  publié dans le Connecticut aux USA en 1764. Cette presse américaine balbutiante se réduisait  en fait à quelques feuillets publiés en 2 ou 4 pages dans lesquels on trouvait déjà quelques encarts publicitaires. Elle était entièrement financée par l’Etat qui tenait encore à contrôler l’information locale et internationale. Ce n’est que quelques années plus tard, plus précisément en 1776, que l’Etat de Virginie se fait l’auteur de la première proclamation de  la liberté de presse  aux USA. Cette percée sera suivie 158 ans plus tard, en 1789 , par l’amendement de la constitution américaine interdisant toute limitation à la liberté de presse . Notons qu’en 1785 apparaissait déjà le  Daily universal register qui deviendra le Times en 1788.

En France, c’est également en 1789  que La déclaration des droits de l’homme et du citoyen annonce,  le 24 Août : La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler , écrire, imprimer librement , sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.

Cette liberté de la presse induite par l’euphorie de la révolution française connaîtra une fortune incertaine et variable. Elle ne durera, en fait, que trois années puisqu’elle  sera très vite supprimée en 1792 par le Directoire, aux réunions duquel assistaient auparavant les journalistes et mise sous contrôle du  gouvernement. Beaucoup de journalistes furent alors guillotinés. Rétablie et annulée successivement par les régimes qui se succédèrent et que nous ne citerons pas tous, la liberté de presse fut supprimée en 1800 par Bonaparte qui rétablit l’autorisation préalable. Il existe un journal, Napoléon, et un journaliste, Napoléon, vitupéraient alors des journalistes, frustrés d’avoir été privés de liberté d’expression et d’opinion. 

C’est la loi du 29 juillet 1881 qui va réinstaller  la liberté des médias. La 3ème  république (1870-1940) vote alors la loi sur la liberté de   la presse   dans   laquelle   il est   stipulé   en   son article 1 : L’imprimerie et la librairie sont libres. Dès lors, cette liberté pourra s’exercer sans grand contrôle jusqu’à aujourd’hui, avec une interruption durant la  première guerre mondiale.

Parallèlement à cette  libération de la parole, le développement industriel et  la progression de l’instruction vont donner à la presse un nouvel essor. Ainsi il faut certainement mentionner  les inventions techniques dans le domaine de l’impression et de la diffusion de la presse  ainsi que dans les moyens de communication qui vont démultiplier les capacités de la presse et la rendre plus concurrentielle. 

Ø         1825 : La 1ère ligne de chemin de fer en Grande Bretagne est     lancée par     Stephenson
Ø   1833 :   Invention du télégraphe
Ø        1848 : Fabrication de la première presse rotative qui sera utilisée pour la première fois par le Times en 1860
Ø        1885 : La première composeuse, la Linotype, est fabriquée par Ottmar Mergen Mergenthaller. Elle est utilisée pour la première fois par le New York Tribune en 1886. La presse l’utilisera jusqu’en 1970.
Ø        1875 : Fabrication de la 1ère automobile à vapeur par  Amédé Bollé et première transmission téléphonique par Graham Bell
Ø   1890 : Le téléphone sans fil est inventé par Edouard Branly
Ø   1896 : Le télégraphe sans fil est inventé par Guglielmo


Au 19ème siècle, les titres de la presse française et américaine connaîtront une grande effervescence, les journaux rivalisant d’ingéniosité pour attirer le lecteur.  Ce même siècle est aussi caractérisé par le renforcement de la différenciation de l’identité des titres, différenciation qui balisera ainsi l’apparition de deux types de presse, la presse politique et la presse de masse .   C’est ainsi que cette période sera marquée par  la naissance de certains grands titres dont l’orientation est essentiellement politique et qui ont aujourd’hui pignon sur rue.

Ø   En 1826, le chansonnier  Maurice Alhoy et le romancier Etienne Arago fondent le Figaro qui était à l’origine un petit hebdomadaire  de 4 pages et qui deviendra plus tard, en 1886, sous la direction de Villemesan, un quotidien beaucoup plus fourni. Il doit son titre à la maxime du  Figaro de Beaumarchais dans le  Barbier de Séville: Sans liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur. 

Du point de vue de sa ligne éditoriale, il est considéré, aujourd’hui, comme le quotidien de la droite française libérale (droite et centre droit). Mais il est surtout regardé comme le journal des académiciens, de grands noms y ont collaboré comme Emile Zola , François Mauriac et André Gide . L’académicien Jean d’Ormesson en a été le directeur en 1981. Et pour conclure, il a aussi acquis la réputation d’être un journal mondain, celui du rond-point des Champs Elysées.

Outre le quotidien, Le Figaro édite quatre magazines, Le Figaro littéraire, Le Figaro Magazine, Le Figaro Economie et Madame Figaro. Quant à son financement notons qu’en 2004 le groupe Dassault (GIMD) prend le contrôle de la Socpresse maison mère du Figaro.

Ø   A la même époque, Charles Louis Havas crée en 1835 la première agence d’information mondiale l’Agence de feuilles politiques , correspondance générale. La formule était audacieuse et originale. Provenant des journaux du monde entier, les informations étaient convoyées vers Paris par des pigeons voyageurs et traduites immédiatement. Cette agence est devenue aujourd’hui l’AFP.

Ø   En grande Bretagne l ‘agence Reuter est fondée en  1851

Ø   De l’autre côté de l’Atlantique, les USA vont lancer, la même année, le premier numéro  du New York Times.

Ø   L’année 1891 verra la fondation du premier quotidien sportif Le vélo par Lippman.

Ø   Aux USA Joseph Pulitzer, Edward Willis Scripps , William Randolph Hearst professionnalisent la presse.

Ø   En 1871 The New York Herald, publié en Angleterre, envoie Sir Henry Morton Stanley à la recherche de   David Levingston ; c’est lui qui inventera le reportage sur le terrain qui captiva des millions  de lecteurs. [7]

Ø   En 1904 Ludovic Nadeau couvre la guerre russo-japonaise et plus tard en 1917 il publiera une interview de Lénine. [8]




3.Le développement de la presse au 20ème siècle en Europe et aux USA

3.1  Le développement de la presse en Europe


La période charnière entre la fin du 19ème siècle et le début du 20ème siècle est considérée comme une période faste pour la presse et représenterait son âge d’or, aussi bien en France qu’aux USA. La bonne vieille recette des chroniques réapparaît ;  avec ses pointes ironiques et son humour dévastateur elle connaît un développement magistral, permettant de fidéliser un lectorat important. La presse d’information générale supplante la presse politique, on voit alors naître la presse spécialisée avec ses articles sur le sport, les femmes et les enfants, la santé, les loisirs…

C’est aussi le début du  20ème siècle qui  verra l’accélération des découvertes techniques qui vont, avec la croissance économique et culturelle, stimuler  le développement de la presse et sa diversification.

Ø   1904 : 1ère impression  en offset par Rubel
Ø   1913 : Fabrication des téléscripteurs par Charles Krum
Ø   1915 : Fabrication  de la 1ère  photocomposeuse

 Plus tard en 1919, on est donc à la fin de la première guerre mondiale, on assistera en France à la levée de la censure, surnommée alors ironiquement Madame Anastasie, censure instaurée auparavant par le ministère de la guerre le 4 août 1914.

Rappelons que Jean Jaurès a fondé L’Humanité en 1904.

Une des publications les plus en vue de la presse française aura vu, entre-temps,   le jour. En 1915, Maurice et Jeanne Maréchal fondent Le  Canard enchaîné  pour contourner la censure liée à la guerre. De grandes plumes de la littérature française y collaborent tels Anatole France, Tristan Bernard ou Jean Cocteau.

 Toujours en France, l ‘évolution technologique, la liberté d’expression, la multiplication des titres  amèneront les journalistes, appelons les : les écrivains de presse, à chercher  à se regrouper  dans des organisations de type corporatiste en vue de mieux défendre leurs droits. On peut donc  relever les deux faits marquants suivants :

Ø   1918 : Création du syndicat national des journalistes français
Ø   1935 : Adoption de la loi sur le statut professionnel des journalistes
Ø   1938 : Adoption de la charte éthique des journalistes

D’abord, quelques rappels historiques, pour tenter de suivre le parcours qui a permis de parvenir à  ces conquêtes . Cette période est caractérisée par un déploiement considérable de la presse politique qui prendra fait et cause pour les intérêts des couches sociales défavorisées et la dénonciation des maux sociaux. Certains historiens de la presse considèrent que c’est le journalisme social qui en a été le principal acteur. Celui-ci apparaît au début du siècle dernier avec un petit groupe de journalistes à l’origine du  syndicat des journalistes du mouvement social (1905) puis du syndicat des journalistes du mouvement social (1922). Les objectifs assignés à ces deux syndicats sont la défense du mouvement ouvrier , l’élaboration d’un statut qui mette les journalistes à l’abri des pressions salariales. Cette lutte va déboucher sur la loi de 1935 relative aux  journalistes professionnels.

Rappelons qu’au début de sa constitution, le groupe des journalistes sociaux[9]  revendiquait une proximité avec le mouvement ouvrier et ses luttes bien que la grande majorité d’entre eux soit issue de la bourgeoisie. Les grèves sont l’objet privilégié des reportages qui sont rédigés uniquement sur la base des points de vue des syndicats ouvriers. Il connaîtra une profonde mutation durant la période allant de 1960 à 1970 où il défendra une conception plus professionnelle et plus objective de son activité : vérification des sources, confrontation des points de vue, etc. Une grande place est donnée aux points de vue des experts, des sociologues, des économistes et des managers. Les informations recueillies auprès de la classe ouvrière sont considérées comme nécessaires mais insuffisantes, le recours aux données administratives des ministères et à celles fournies par les chefs d’entreprise devient une pratique admise et encouragée. 

A la veille des événements  qui secouèrent la France en  mai 1968, ce groupe se scinde en deux tendances, l’une voulant retourner à sa vocation première de défense des intérêts des ouvriers, l’autre préférant continuer à exercer un journalisme permettant de confronter tous les points de vue.

Selon S.Levêque[10], le journalisme social a été à l’origine de trois conquêtes importantes pour l’exercice du métier de journalistes.

Ø   Il a lancé un débat crucial sur les relations pouvant exister entre professionnalisme et militantisme.
Ø   Il a également abouti à l’institutionnalisation de la profession de journaliste et a donc contribué à l’autonomisation de la profession.
Ø   Il a permis, enfin, de guider les pratiques journalistiques en inventant une presse qui a pour vocation la défense de tous les points de vue et non la promotion des opinions des rédacteurs et des propriétaires de journaux.  

Mais au regard de tout cela, S.Leveque se demande si le journalisme social, à trop se conformer aux normes professionnelles, n’a pas fini par perdre sa vitalité c’est-à-dire l’essentiel de ce qui a fait sa spécificité militante et son dynamisme.

Dans le même ordre d’idées, il est capital pour saisir la configuration actuelle du paysage médiatique, de parcourir également l’histoire de la création du  Syndicat National des Journalistes (SNJ) , car ses débats sont ceux qui parcourent également toute la presse dans la monde et bien évidemment en Algérie aussi.

A l’origine, une quinzaine de journalistes[11] et quelques écrivains dont quelques-uns  sont issus de l’association des journalistes du mouvement social, ont fondé le 10 mars 1918 le SNJ.  Celui-ci restera en France le seul syndicat de journalistes jusqu’en 1938.

Ses objectifs sont, essentiellement,

Ø  Assurer le respect dû à la profession de journaliste en vue d’augmenter    son prestige en remplissant un rôle semblable à celui de l’ordre des avocats
Ø  Assurer la sauvegarde des droits professionnels
Ø  Eriger un club de la presse

Face à certains dépassements considérés comme graves du point de vue éthique et déontologique, la première tâche que s’assignera le syndicat est de confectionner un code des devoirs du journaliste qui aboutira à la fameuse charte de 1938 dont beaucoup de dispositions subsistent encore aujourd’hui.

Il s’agissait aussi de lancer les bases d’un contrat de travail reconnaissant aux journalistes un salaire minimum, le droit à la signature, la journée de 8h, le repos hebdomadaire, les congés payés. Notons que ces luttes face au patronat étaient celles de toute la classe laborieuse de l’époque.

Mais il est reconnu par la communauté des journalistes que la bataille la plus dure et la plus longue qu’a eu à conduire le SNJ entre 1920 et 1935 fut celle, menée également par les journalistes sociaux, en vue de l’érection d’un statut pour les journalistes. Elle fut dirigée sous l’égide de Georges Bourdon, considéré par certains comme le père de ce statut et véritable organisateur du journalisme français. Elle aboutit en 1935 à la loi Guernut-Brachard, portant statut des journalistes.

L’apport de ces syndicats au monde de la presse sera sa contribution à l’ouverture et à l’animation de beaucoup de débats essentiels liés à la confusion éventuelle entre enquête journalistique et presse à spectacle ou à scandale ; éthique et recherche du profit ; financement des journaux et indépendance éditoriale ; militantisme pour une cause considérée comme juste et propagande ; surveillance de la liberté de presse et autoritarisme.  

3.2       Le développement de la presse aux USA

Aux Etats Unis, la fin du 19ème siècle  connaît un fort développement économique en raison de la découverte de gisements d’or considérables, le développement de vastes étendues arables, l’extension du chemin de fer. Le début du 20ème  siècle verra ensuite une importante croissance démographique, une industrialisation grandissante et de nouvelles découvertes technologiques dont les Américains sauront tirer grand profit.

Dans cette euphorie économique, l’effervescence culturelle plus particulièrement dans le monde de la communication est considérable. Les USA sont alors la 1ère puissance cinématographique du monde : Rappelons  quelques noms d’immenses acteurs  de l’époque tels Rudolph Valentino ou Charlie  Chaplin dans les films sont produits par la grande maison de production la Métro Goldwin Mayer dans les années vingt. En  1931, on   relève   l’existence de 22. 371 salles de cinéma totalisant 11 millions de places et 90 à 100 millions d’entrées. Ainsi Kaspi déclare : La société médiatique dans laquelle nous sommes entrés a pris son véritable essor dans les années trente lorsque les médias se multiplient et deviennent de plus en plus puissants, en particulier aux USA[12] .

La littérature américaine connaît elle aussi un épanouissement sans pareil. Rappelons les œuvres de certains auteurs célèbres qui ont brillamment enrichi le patrimoine littéraire mondial. Gertrude Stein (1874-1946) l’auteur de  Américains d’Amérique, publié à Paris en 1925 ; Dos Passos (1896-1970) qui a écrit  Manhattan transfer et La grosse galette publié en 1936 ; Faulkner (1897-1962)  l’auteur de Lumières d’Août en 1936 et L’intrus et aussi  lauréat du prix Nobel de littérature en 1949 ; Scoot Fitzgerald (1896-1940) auteur de Gatzby le magnifique en 1925 ; Hemingway (1898-1961)auteur de Le soleil se lève aussi et  L’adieu aux armes et aussi prix Nobel en 1954.

C’est dans cette vitalité de la vie culturelle que la presse trouvera un terreau favorable à son développement et qu’elle même participera, à son tour, à démultiplier. Le journal quotidien devient une véritable institution et sa lecture est plus qu’une habitude de l’Américain qui le trouve, le plus souvent, déposé devant sa porte. Mais, à l’instar de l’industrie américaine, la presse se regroupe autour de gros titres tels que  Scripps, Howard, Munsey, Heasrt, ce qui a tendance, selon certains journalistes, à nuire à sa diversité.

Cette presse vit surtout et très largement de la publicité. Beaucoup lui reprocheront d’être au service des magnats de l’industrie de la société de consommation. En effet, se nourrissant l’une de l’autre et se renforçant mutuellement, le développement des titres et celui de la consommation suivront le même rythme.   Les recettes d’un journal proviennent, pour la moitié, des annonces en 1909 et pour 64%  en 1927. De ce fait, la publicité influence de plus en plus les comportements des consommateurs [13]. Beaucoup de sociologues affirment que la société de consommation, tant décriée par certains, n’aurait jamais connu un tel développement sans le soutien de la presse et le matraquage médiatique des consommateurs dont elle a fait preuve. Ce qui a conduit certains à penser que son objectif premier  est le développement de la consommation, l’information ne devenant alors qu’un support secondaire. Un point de vue que ne partagent pas d’autres analystes. En tous les cas le débat existe et mérite d’être signalé.

Une des grandes particularités de la presse américaine, qui fait son originalité et son dynamisme mais aussi ses dérives, c’est sa proximité avec le vécu quotidien des lecteurs . (…) La caractéristique essentielle de la presse est l’intérêt qu’elle porte à la vie quotidienne de ses lecteurs. Associated Press révèle : en 1929, sur 2,5 millions de mots, 95% concernent les nouvelles quotidiennes des USA[14].  Les grands reportages  sont copieux. Les faits divers constituent la matière principale des papiers : les enquêtes policières, les procès, et autres événements retentissants font les unes de grands journaux nationaux ou locaux qui pullulent. On y trouve également de grands reportages sur la société américaine centrés sur des thèmes tels que la délinquance, la   pauvreté, les prisonniers, la toxicomanie, et toutes les autres formes de violence sociale et d’exclusion.

Mais on y trouve aussi de grands reportages et des analyses remarquables sur des événements politiques retentissants qui ont marqué l’histoire des Etats Unis ; ils font l’objet de publications de grands titres connus mondialement tels que le New York Times, le Washington Post, etc. De grands hommes politiques sont encensés ou détruits par cette  presse d’investigation qui mérite réellement son appellation de 4ème  pouvoir. Rappelons nous la publication des rapports secrets du Pentagone sur la guerre du Viet Nam ou  l’affaire du Watergate quand, en 1970, deux journalistes, Bob Woodward et Carl Bernstein,  révèlent le scandale des écoutes téléphoniques à la Maison Blanche et amènent le président des Etats Unis, Richard Nixon,  à démissionner.

4.La presse contemporaine
                   
4.1 La presse française

Il est généralement admis qu’on ne peut comprendre la culture médiatique d’un pays sans se référer à son  passé aussi bien  son histoire lointaine que récente. Cette référence nous expliquera, par exemple,  certains choix éditoriaux et débats  qui ont eu lieu en Europe à la fin de la seconde guerre mondiale.

En effet, si quelques journaux entrent dans la résistance durant l’occupation de la France par l’Allemagne, beaucoup d’autres ont été accusés de collaboration. Parmi ces publications on cite, par exemple,  L’Emancipation nationale de Jacques Doriot, La France au Travail, La Gerbe, La Marseillaise. En 1944, le gouvernement provisoire d’Alger suspend les titres accusés de collaboration. A la libération une commission d’épuration constituée de magistrats et de journalistes est mise en place.

C’est dans ce contexte d’épuration qu’on assistera en Europe entre 1945-50 à une complète restructuration du paysage médiatique qui commence aussi à faire la différence entre plusieurs types de presse telles que la presse de qualité, la presse populaire, la presse de caniveau à gros tirage, la presse politique, la presse d’informations générales.

En France, en cette même période et dans le même souci d’opérer une profonde décantation dans le champ médiatique, le Général de Gaulle exprime le souhait de voir le lancement dans le paysage de la presse nationale d’après guerre  d’un organe de presse de référence. Il s’agissait en fait de placer dans le champ médiatique un quotidien qui soit indépendant des partis politiques, des puissances financières et des églises.  C’est ainsi que sera fondé en 1944 le quotidien le Monde, un journal de centre gauche,  dirigé par Franck Brentano et Hubert Beuve-Méry qui en restera le directeur pendant plus d’un quart de siècle. De grands noms y collaborent.  Il est dit qu’actuellement le seul titre de la presse française quotidienne  qui soit resté indépendant financièrement et propriété exclusive de ses seuls journalistes[15]. Il est la publication principale du groupe de presse : la Vie-le Monde. En 2004 le journal a vend régulièrement 580.803 exemplaires.

Son supplément,  Le Monde Diplomatique, un journal qui se veut d’opinion, d’information, de documentation et d’investigation a été  fondé en 1954. Très contesté ou fortement encensé, Il est destiné à l’origine aux cercles diplomatiques comme son  nom l’indique . Ses articles sont généralement rédigés par des spécialistes internationalement reconnus, notamment des membres des grandes institutions internationales. Sa ligne éditoriale  est orientée plutôt à gauche. Une des tendances qu’il affiche ouvertement est la contestation de l’hégémonie américaine sur le monde et aussi la critique du néo libéralisme. Ainsi, un article écrit par Ignacio Ramonet, président du directoire et directeur de la publication,  conduisit à la création de la célèbre ONG internationale ATTAC qui organise à travers le monde entier de violentes manifestations contre la mondialisation.

Quant à son capital, il est détenu à 49% par les lecteurs qui constituent une minorité de blocage et à 51% par le quotidien Le Monde.

On ne peut clore ce rapide survol de la presse française sans faire référence aux trois publications suivantes qui y occupent une place de choix. L’intérêt de ce parcours étant de suivre le processus de différentiation identitaire des titres qui s’adressent chacun à des segments du lectorat, précisément ciblés.

Ø   En 1949 , l’homme d’affaires Jean Prouvost qui avait  racheté en 1938, Match,  un journal sportif, lui donne   un nouveau look inspiré du magazine américain Life et un nouveau titre : Paris Match. Les Français découvrent avec étonnement et sympathie cette nouvelle presse dont la  couverture du N° 1  exhibait en grand la photo de  Winston Churchill . Ceci constitua une  première dans le paysage médiatique bien conventionnel qu’il participa à rendre plus audacieux et donc plus séduisant. Basé essentiellement sur le reportage photographique sur le terrain, le magazine souhaitait donner plus de vie et de concret aux événements relatés. La majorité des magazines imiteront, plus tard, son modèle de couverture.

Ø   En 1953, J.J Servan Schreiber et Françoise Giroud fondent L‘Express  qui est au départ un simple supplément hebdomadaire du quotidien Les Echos. En 1964,  ils lui donnent un nouveau look inspiré du Times-News Magazine. Sa population cible est constituée essentiellement par les cadres supérieurs de l’administration et des entreprises. L’Express est vendu aujourd’hui à  600.000 exemplaires. Suite au départ de ses deux fondateurs en 1970, un groupe de journalistes démissionne du journal L’Express et fonde l’hebdomadaire Le Point qui vise essentiellement une population de cadres moyens  installée en dehors de Paris .

Ø   1973 : JP. Sartre et Serge July fondent le quotidien Libération, appelé couramment Libé. Il est caractérisé d’une part, par un mode de gestion novateur qui met sur un pied d’égalité tout son personnel et d’autre part, par sa ligne rédactionnelle qui peut se traduire dans le choix stratégique de  l ‘indépendance à tout prix. Il est lu essentiellement par les cadres moyens et les intellectuels de gauche.


4.2 La presse étasunienne


Ø Le Washington Post , le grand journal américain d’investigation  est fondé en 1877 par Stilson Hutchins,  journaliste plutôt favorables aux idées du parti démocrate. Il est alors le premier quotidien américain à paraître 7 jours sur 7. En 1905, il introduisit le dessin humoristique  et donna une orientation sensationnaliste à ses écrits, mettant l’accent sur les faits divers et les scoops dont beaucoup donnèrent lieu à des scandales. Eugène Meyer , son directeur en 1930, deviendra plus tard, en 1946, le premier président de la Banque Mondiale. Le WP s’est vu décerner  le prix Pulitzer pour son grand reportage sur l’affaire du Watergate. Certains lui reprocheront certains dérapages et il perdra parfois de sa notoriété. Mais son audience demeure, malgré tout, très élevée puisqu’on ne relève pas moins de 160 millions de pages visitées annuellement sur le Net. En 1970 un médiateur est désigné pour veiller sur son indépendance. Le quotidien de Washington  est la propriété de la Washington Post Company, propriétaire de chaînes de télévision, de réseaux câblés et   du capital de l’International Herald Tribune, publié à Paris.

Ø  Le New York Times a été fondé en 1851 par Henry Jarvis Raymond et Georges Jones . Il obtient son premier prix Pulitzer en 1918 suite à la publication de reportages quotidiens et retentissants sur la première guerre mondiale. Deux journalistes prestigieux, Maureen Dowd ( prix Pulitzer en 1999) et Thomas L. Friedman  (prix Pulitzer en 1983, 1988, 2002) font sa notoriété. Il faut noter qu’il affiche à son palmarès, 90 prix Pulitzer. Rappelons que celui-ci   est décerné depuis 1918, par Joseph Pulitzer éditeur du journal World. Il est attribué annuellement par l’université de Columbia de New York à plus de vingt catégories de presse : reportage, éditorial, caricatures, photographies mais aussi à des romans, biographies, poèmes, théâtre et poésie.   L’agence de presse AP (Associated Press) en a décroché 45.

Le quotidien New Yorkais tire son originalité de la diversité de ses rubriques et de sa mise en page. Il se distingue,  en 1970, en lançant la section
Op-ed, constituée de pages d’éditoriaux écrits par des journalistes de la rédaction plutôt que par l’équipe d’édition et aussi en publiant des articles de collaborateurs indépendants.

Sa mise en page remarquable qui comprend invariablement les trois sections suivante, fidélise ses lecteurs.

Ø  La section des news : Les nouvelles nationales et internationales, les affaires, la technologie, les sciences, la santé, les sports, la région New Yorkaise, l ‘éducation, la météo et les annonces nécrologiques

Ø  La section opinions : Les éditoriaux Op-ed et le courrier des lecteurs

Ø  La section divers : Culture générale, voyages, le guide de la ville de New York, les restaurants, les vins, la décoration

Grâce à ce mélange subtil entre le sérieux, la diversité et la diversification de l’information,  la qualité de la présentation et une créativité contrôlée et discrète, il réussit à  séduire un très vaste  public puisqu’en  2004 il affiche allègrement 1.124.700 abonnés et 1.669.700 abonnés à l’édition du dimanche. Selon certains observateurs, le New York Times fait chic et choc. Il a été mis, gratuitement, en ligne en 1996.

4.3  La presse anglaise

            L’Anglais est considéré comme un papivore et décrit comme un boulimique de presse écrite. La presse de qualité y est dominée par The Observer et  The Times. Le Sunday Times, supplément couleur de celui-ci, rivalise honorablement avec les grands magazines américains d’information, tels que Life et Times.

Rajoutons dans cette liste des journaux The Economist, The financial Times, The Guardian, The telegraph. Mais selon certains observateurs, la perte de lectorat impose à la presse de qualité de s’aligner sur les standards de la presse people. C’est pourquoi certains amateurs orthodoxes de la presse de qualité disent amèrement que la différence entre ces deux types de presse  tend à  s’estomper depuis le début des années 90.

            La majorité des autres grands titres, plus particulièrement ceux publiés le dimanche, sont considérés par les grands journalistes anglais comme faisant partie de la presse people, presse racoleuse destinée aux classes moyenne et populaire. Apparus dans les années cinquante, ce sont des quotidiens à grand tirage[16], portés sur le sensationnel, le scandale, avec à la une, des titres choc et des images accrocheuses . Grâce à l’utilisation abusive de la photo couleur, des feuilletons , des bandes dessinées  et  aussi le  sport, les  programmes télé  et  radio, leur  audience est considérable . Ils font la part belles aux frasques, ou présentées comme telles, des gens célèbres, les reportages étant généralement  assaisonnés  par des affaires de drogue . Et pour noircir le décor, le sexe devient, à partir des années 60, un argument de vente , le tout agrémenté par les potins de la vie de la famille royale et les faits divers de la délinquance ordinaire, présentés régulièrement comme des scoops. Rappelons-nous la dénonciation unanime des paparazzis pour leur harcèlement des personnalités du monde politique et du showbiz jusque dans leur vie la plus intime. The Sun, journal people par excellence et propriété du groupe Murdoch, domine le marché du quotidien avec ses 4 millions d’exemplaires sur les 10 millions édités quotidiennement.
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Le deuxième succès des années 60 est constitué par la presse destinée aux teen-agers (les adolescents) qui se nourrit des thèmes habituels de la civilisation des loisirs : la vie de leurs idoles préférées, la diffusion de la mode tendance, les derniers tubes qui font très in,  et autres thèmes dont raffolent ces lecteurs à peine sortis de l’enfance.


La presse et son lectorat, aujourd’hui


La diffusion de la presse doit affronter, aujourd’hui, les changements sociologiques introduits par les nouvelles technologies de l’information. Il est bien évident que l’audience de la presse ne peut plus être la même avec l’apparition d’Internet et des journaux gratuits et l’entrée dans leur gestion des grands empires financiers de presse. De ce fait, si la consommation mondiale de la presse dans le monde a plutôt tendance à augmenter en moyenne, certains pays industrialisés font face à une diminution réelle et progressive de celle-ci.

Ainsi, en France, le taux de pénétration de la presse auprès de la population est tombé de 22% en 1973 à 15% en 1997. Aux USA, il est passé de 27% en 1987 à 23% en 1995. En dépit de ces chiffres inquiétants, il n’y a pas lieu d’être alarmiste puisque, malgré une concurrence féroce dans la recherche de l’information et de la publicité, les journaux continuent à tenir leur place dans un marché difficile, a estimé T.Balding , DG de l’AMJ, donc un personnage important dans le monde de la presse dont l’avis compte. En réalité ce sont les magazines qui tiennent le haut du pavé et donnent ainsi à la presse sa bonne tenue alors que le paysage médiatique reste encore caractérisé par une chute d’intérêt pour les quotidiens que rien ne semble pouvoir arrêter.

En France, par exemple, si on constate que 8,12 milliards d’exemplaires ont été vendus pour l’année 1996, il faut savoir que ce succès est dû essentiellement à la presse magazine. La tendance s’est accélérée aujourd’hui mais je n’ai pu obtenir des chiffres plus précis. Pour se maintenir, des journaux comme Le Monde, Le Figaro, Libération, lancent des suppléments thématiques autour de sujets liés à la vie quotidienne dans les domaines culturels, scientifiques et techniques.

En Allemagne Bild Zeitung est en tête du palmarès avec 3 millions d’exemplaires suivi de  Der Spiegel qui tire lui aussi à plusieurs millions d’exemplaires.

Les USA, quant à eux , on sait qu’ils restent les maîtres incontestés de la presse magazine avec Neewsweek, US New and report, Look, Life….

Notons aussi  qu’en 2003, la lecture des journaux ailleurs dans le monde est en hausse constante dans 28% des pays et sur cinq ans (98-02) dans 35% des pays. Du point de vue de la lecture des journaux par tête d’habitant en Europe, les Norvégiens sont en tête de liste suivis par les Japonais ensuite  les Finlandais, les Suédois et les Suisses. Il faut dire que les pays nordiques ont toujours été considérés comme le bastion de la presse.

En ce qui concerne les pays dotés d’un lectorat considérable en raison de l’importance de leur population, on peut citer, par ordre de grandeur, les pays suivants :

Ø  La Chine, avec une population de 1. 275.215.000 habitants[17] qui, en 1999, ne publie pas moins de 20 milliards d’exemplaires ! En outre, elle détient un record mondial avec 82 millions d’exemplaires vendus chaque jour.

Ø  Le Japon, avec une population de 127.500.000 habitants qui publie 71.000.000 d’exemplaires.

Ø  L’Inde,   avec une population de 1.068.600.000 habitants qui publie  57.844.000   d’exemplaires.

Ø  Les Etats Unis,   avec une population 291.500.000 habitants qui publie 55. 186.000 d’exemplaires[18].

Ø  Quant à la presse européenne, c’est en  Grande Bretagne avec sa population de 59.200.000 habitants, que la PQN reste de loin la plus puissante avec 11 titres édités quotidiennement, représentant 10 millions d’exemplaires. Il faut dire qu’avec le nombre important de titres, le  marché de la presse y est quasiment saturé.

Ø  Dans le monde arabe, l’Egypte avec 72.100.000 habitants  publie El Ahram, le journal le plus lu dans la région avec ses 4 millions d’exemplaires quotidiens.


C’est en Europe que la désaffection pour la presse est en augmentation constante. La presse traditionnelle voit son audience décliner car semble-t-il les mass-médias inspirent de moins en moins confiance, selon des sondages concordants. Ainsi,  sur cinq ans, de 1999 à 2004, la diffusion a baissé dans onze pays d’Europe , de la façon suivante : France : 5,1% ; Allemagne : 7,7% ; Royaume Uni : 8,7% ; Belgique : 6,9% ; Danemark : 9,5% ; Autriche : 9,9% .

Seuls deux pays ont connu une augmentation sensible de leurs ventes à l’image de l’Italie qui a connu une croissance de ses ventes équivalant à 2,8% ainsi que l’Irlande où celles-ci ont augmenté de 0,5%. En Espagne, si le nombre de lecteurs ne diminue pas, il n’augmente pas non plus. Cette stagnation inquiète fortement les éditeurs de presse.

Les Japonais montrent, eux aussi, un début de désintérêt pour la lecture de la presse avec  1,12 quotidien par jour et par habitant en 2003 contre 1,29 en 1999. Les quotidiens nationaux  représentent 53% du tirage de l’archipel alors que les quotidiens régionaux constituent 37%. La presse sportive accapare, quant à elle, 10% des diffusions. La méthode de diffusion qui se fait au porte à porte est l’une des raisons qui explique l’ampleur de la consommation de la presse puisque 93,9% des journaux sont achetés par  abonnement. Chaque grand journal a son propre réseau de distribution. Les prospectus publicitaires qui accompagnent le journal constituent la principale source de revenus des maisons de presse. Notons cependant que le Japon demeure encore le paradis de la presse comme le signalent beaucoup d’observateurs, avec ses prestigieux journaux à l’image de Mainichi shinbun, Asahi shinbun, Yomiuri shinbun qui comptabilisent des millions de lecteurs.

La baisse d’intérêt pour la lecture des journaux y touche particulièrement les jeunes, les enquêtes de lectorat ayant montré qu’un jeune Japonais sur quatre refuse de lire la presse écrite. Pour faire face à cette situation, l’un des recours utilisé par les éditeurs de presse est l’édition en ligne qui offre une consultation pour 5€, ce qui représente la moitié du prix de la version imprimée. Toujours dans la même intention de capter le lectorat constitué par les jeunes, il leur est proposé un service d’information, via le téléphone portable.

Une des autres conséquences importantes de la mévente croissante de la presse dans ces pays c’est la  diminution du nombre de points de vente, ceci  entraînant, en plus de  la baisse des rentrées financières, une perte d’emplois relativement élevée. Ainsi, en France, en huit ans, de 1995 à 2003, 4600 points de vente ont disparu sur un total de 29. 200. Cela représente des pertes d’emploi et financières importantes du fait que la rémunération des diffuseurs s’élève à 13% du prix de vente par unité pour la plupart des points de vente et qu’elle peut atteindre jusqu’à  18% dans les grandes métropoles, comme Paris et Lyon.

En Grande Bretagne,  où elle  équivaut à 25% du prix de vente du journal, la mévente des journaux y a  une incidence encore plus forte sur les revenus des patrons de presse et de leurs diffuseurs.


Le Financement de la presse

Un des points d’achoppement de la presse reste, bien entendu, son financement. Deux modes de financement sont couramment pratiqués tels que l’autofinancement intégral comme c’est le cas pour la presse anglo-saxonne, ou une aide accordée  par l’Etat comme c’est le cas, par exemple, en France ou au Danemark.

Pour mieux saisir la différence entre les divers modes de financement, un détour du côté de la presse anglaise et française est incontournable tant la différence entre les deux est grande et invite à réflexion. L’intérêt de ce parcours est qu’il permet d’appréhender les termes de l’un des problèmes auxquels s’affronte l’Algérie d’aujourd’hui dans son projet de réforme de sa presse et pourrait ainsi être source d’inspiration. Ecoutons J.C Chalaby[19]  qui explique, de la façon suivante, le contraste entre la France et la Grande Bretagne :

(…) ces deux pays représentent deux chemins différents en direction de la modernité . L’économie de marché , la concurrence, le commerce international bref, toutes les choses qui, associées au capitalisme, se sont manifestées avec force en Angleterre, depuis plusieurs siècles. En France, depuis Richelieu et Louis XIII,  on voit l’émergence de l’Etat comme principe organisateur de l’économie et de la société . (…). L’Etat Français offre de larges subventions à la presse ; la concurrence est féroce entre journaux anglais qui ne vivent que de la publicité. Deux exemples à méditer, donc.

L’auteur continue sa réflexion en constatant que dans le Royaume Uni, ultra libéral, il existe avec la presse un rapport capitaliste alors que dans la France laïque et républicaine, le rapport est social et politique. Il conclut en  signalant que toute approche de la presse ne peut se faire sans poser la question du rôle de l’Etat et de l’économie de marché et du rapport entre l’Etat et le marché . Rajoutons quant à nous qu’il est nécessaire de réfléchir aux relations pouvant exister entre l’Etat, le marché, la stratégie politique et la presse.

Cette physionomie différentielle de la presse en Europe a fait dire au journaliste Patrick Eveno : Si les paysages médiatiques européens sont fortement contrastés en ce début du 21ème siècle c’est parcequ’ils sont le résultat d’une longue histoire propre à chacun des pays dans laquelle histoire politique et  histoire des entreprises sont également actives[20].

Pour approfondir cette revue du financement de la presse, examinons d’abord le cas de la presse  subventionnée pour tenter d’en cerner les contours. Plus loin nous nous pencherons sur le cas de la presse non subventionnée.

·                              Commençons par l’exemple danois. Un million et demi de journaux y sont distribués chaque jour et 74,3% de la population lit un quotidien dans un petit pays de 5,5 millions d’habitants. Les tirages sont considérables, ils s’élèvent à  plus de 500.000 exemplaires. Concernant les quotidiens, les chiffres suivants sont avancés : Jyllands-posten  imprime 179 700 exemplaires quotidiennement, quant au  Berlingske son tirage s’élève à 148.850 exemplaires ; Le Politiken met sur les kiosques 142.000 exemplaires alors que le  BT  tire à 120.800 exemplaires.

Malgré ce succès, la crise de la diffusion de la presse quotidienne qui touche une grande partie des pays européens a atteint aussi par ricochet le Danemark qui par conséquent a décidé de lancer une vaste opération de modernisation de sa presse. Pour ce faire, il a été amené à  fonder un Institut pour le financement de la presse quotidienne en vue de  faciliter la modernisation des installations de celle-ci. L’institut auquel l’Etat apporte son soutien a été créé par les entreprises de presse ; il est financé à la fois par les contributions de ces derniers et par l’Etat.

La quasi-majorité des journaux en sont membres. Ses statuts sont approuvés par le premier ministre, chargé depuis 1970 de la politique de la presse et un conseil de surveillance désigné par celui-ci qui veille à la régularité de la comptabilité de l’institut. Ainsi, l’Etat apporte une aide, à concurrence de 0,8%  par tonne de papier consommée,  à chaque quotidien membre de l’institut, cet appoint étant administré par l’institut lui-même. Ces apports de l’Etat sont substantiels puisqu’ils s’élevaient en 2001, par exemple, à 100.000 €. Remarque importante, cette aide est réservée prioritairement au maintien de titres existants plutôt qu’à la création de nouveaux titres de presse.
      Selon la loi de 1970 sur l’aide économique apportée par l’Etat, celui-ci peut distribuer jusqu’à 1,88 M d’euros provenant du budget de l’Etat et répartis de la façon suivante :
         
50% sont destinés aux trois postes budgétaires suivants :
·- Installations destinées à la production ou la distribution de journaux.
·- Conception et création de nouveaux journaux.
·- Opération de développement et études de marché.

Les 50% restants sont destinés aux plans d’assainissement des entreprises de presse.
       En outre, selon une loi adoptée en l’an 2000, l’Etat met à la disposition des quotidiens qui effectuent un emprunt pour construire ou aménager des locaux une somme pouvant aller jusqu’à 2M d’euros leur permettant de couvrir la caution, en cas de demande de prêt, si leur capital propre n ‘est pas suffisant.
      Les facilités fiscales sont considérables. Ainsi, alors que pour  la TVA le taux appliqué couramment s’élève à 25%, les quotidiens qui paraissent au moins une fois par mois en sont exemptés. Ceci leur permet d’économiser autour de 135 M d’euros.
    
      Pour compléter ce dispositif d’aide au redressement des entreprises de presse, la loi sur la poste prévoit d’autres facilités. Ainsi, le ministre des transports peut imposer à la poste des tarifs très bas pour le transport et la distribution de la presse, ses pertes étant compensées par de budget de l’Etat lequel débourse annuellement une somme équivalant à  39 M d’euros.

     Pour parer à la situation de crise vécue par sa presse, le gouvernement français prévoit, lui aussi, un certain nombre de mesures. Jetons d’abord un regard sur les tirages de quelques grands titres français pour l’année 2004. Au total, un peu plus d’un million et demi d’exemplaires ont été vendus quotidiennement. 
     Les deux titres, Aujourd’hui en France et Le Parisien, se trouvent en tête de liste avec  501 492 exemplaires, suivis par  le Monde,  journal de centre gauche qui tire à 371 803. Le Figaro, journal plutôt de droite, occupe la troisième position avec 341 075 exemplaires alors que Libération réputé pour sa ligne éditorial plutôt de gauche a vendu 146 056. Les Echos et La Tribune ont tiré respectivement 116 856 et  80 840 exemplaires alors que  l’Humanité, organe du parti communiste et le quotidien La croix  ont publié respectivement, 48 996 et 9631 exemplaires.
·
·Pour faire face à la crise rencontrée par la presse quotidienne, le Ministre de la culture et de la communication envisage de débloquer une aide à la modernisation des entreprises de presse pouvant aller jusqu’à  38M d’euros, subvention qui servira à l’accompagnement social de la modernisation des moyens d’impression[21]. Cette somme serait répartie ainsi :

·3,5M d’euros sont destinés au réseau de diffuseurs.
·12,7M d’euros constituent un soutien à la distribution de la presse 
·3 M d’euros seront utilisés à l’encouragement des jeunes à lire la presse.

      Pour faire face à ce désintérêt croissant pour la presse quotidienne quelles sont les solutions trouvées alors par  la presse non subventionnée ?Celle-ci vit bien évidemment des revenus générés par ses propres ventes et  par la publicité. Concernant l’apport de cette dernière[22], il est évalué en France à 51% en 2001. Il peut atteindre jusqu’à 80% du revenu global de l’éditeur, pour certains titres.  Ainsi, il a été constaté que les annonceurs ont dépensé en 2001 près de 4 milliards d’euros auprès de la presse écrite et que  pour 10€ de CA réalisé en 1999, plus de 4€ sont apportés par la PUB commerciale et les annonces. En outre, le même constat relève que pour l’ensemble de la presse éditeur, la progression du CA en 1999 est plus liée à la hausse des recettes publicitaires (+10,8%) qu’à celle des ventes (+4,4%). C’est dire l’importance de celle-ci pour la survie de la majorité des titres.

L’accroissement des coûts de fabrication des journaux rend la situation encore plus pénible pour la presse. En 1999, par exemple, les frais d’achat du papier qui représentent 23,7% du coût d’un journal, ont augmenté de 4,1% par rapport 1998. Cette même année, les éditeurs de presse ont consommé près de 1,5 millions de tonnes de papier.

La naissance de la publicité, comme on a eu déjà l’occasion de le signaler, remonte à 1630 quand  Renaudot crée le bureau des rencontres et des adresses. A sa suite Emile Girardin introduit  le terme réclame pour les annonces payantes. En 1926 c’est Marcel Bleustein-Blanchet qui lance enfin le terme publicité lors de la création de son agence  Publicis, terme qui sera définitivement retenu par tous les annonceurs. Cette agence joue, aujourd’hui, avec beaucoup d’autres boîtes de PUB, un rôle déterminant dans le financement de la presse qui le lui rend très bien puisqu’elle occupe une place prestigieuse dans le catalogue des publicitaires prestigieux.

Dans le classement mondial des boîtes de  PUB   Publicis  occupe,   aujourd’hui[23], la 4ème place mondiale, elle est N°1 en Europe et N°3 au USA et  elle est  aussi N°1  mondial dans le domaine de l’achat d’espaces publiques. En outre, elle est  présente  dans  109 pays et étale un revenu, en 2004, de 3,83 milliards de $. Elle développe ses activités sur 3 axes stratégiques qui  sont  d’abord la  publicité,  ensuite  le  conseil et  achat média et enfin les   agences spécialisées et marketing services (SAMS) avec le marketing direct, la communication santé, les relations publiques.

            C’est dire, en citant cet exemple, l’étendue et la puissance des agences dans la maîtrise de la relation qu’elles entretiennent avec  la presse. La question qui se pose est évidemment de savoir de quelle manière, celle-ci, dans une telle situation de dépendance, peut-elle négocier sa liberté éditoriale alors que ce même financement est vital  pour elle?

Il faut dire qu’en France, par exemple, dans le but de maîtriser le fonctionnement de certaines agences soupçonnées de ne pas répondre complètement aux normes, la Loi Sapin en 1993, introduira beaucoup de restrictions et laissera beaucoup d’entre elles sur le carreau.

En Europe, on  peut  citer parmi d’autres,  l’exemple  italien qui  offre,  aujourd’hui, une image  d’autofinancement intégral de la presse. Les publications de la presse y sont entièrement financées par les revenus de leurs ventes et aussi et surtout par la publicité. Pour ne pas risquer de perdre celle-ci, certains journaux en arrivent même à offrir gratuitement des milliers d’invendus ![24].

Ce mode de financement dessine la tendance mondiale actuelle qui aboutit au regroupement des titres entre les mains d’un nombre réduit de propriétaires.  En Italie, c’est le groupe Berlusconi qui, selon les connaisseurs de ce secteur, en contrôle une grande partie. Ainsi, un de ses groupes,  Mandadori, possède 48,2% de Finivest,  une des plus grandes maisons d’édition de la Péninsule puisque celui-ci possède, outre un important secteur livres, des dizaines de revues et magazines et contrôle un autre éditeur concurrent : Einaudi.

L’exemple italien n’a rien de particulier car les observateurs de la presse des pays développés relèvent qu’on assiste en Europe , par exemple, à une concentration de la propriété de celle-ci entre un petit nombre de mains tels que, Rupert Murdoch (Grande Bretagne), Jean Luc Lagardère, Serge Dassault (France), Silvio Berlusconi (Italie). Idem pour les USA et les pays émergents. Le vingt et unième siècle s’avère être incontestablement l’ère des grands empires de presse.

Citons le cas de la France où les groupes de presse qui dominent le champ médiatique et dont le champ d’action s’élargit progressivement, sont: Aprovia, Bayard Presse, Cyber Press publishing, Emap média,  Alain Ayache, Amaury, Hersant, Socpresse, express, expansion, Marie Claire, Havas, Milan, La vie-le Monde, Hachette-Filipacchi. La diffusion est prise en charge par les Messagerie Lyonnaise de Presse, et les Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne. Le contrôle et la certification de la diffusion reviennent à Diffusion contrôle

En Espagne, le chiffre d’affaire des journaux est lié essentiellement aux revenus provenant de la publicité qui en représentent plus de la moitié. Tous les journaux proposent des promotions : encyclopédies, livres, DVD,  surtout le dimanche où les journaux sont plus chers.

La presse dans les pays en voie de développement

Dans ce survol de l’odyssée de la presse mondiale on ne peut, bien évidemment pas, faire le parcours de tous les pays. Continuer cependant ce périple dans quelques autres pays en voie de développement ou émergents comme la Chine et  l’Egypte[25] peut présenter un certain intérêt. Ce parcours sera bien sûr très bref du fait de l’absence de données suffisantes sur ces pays, généralement peu étudiés et analysés, comme tous les pays de la périphérie. On achèvera cette exploration en faisant un dernier arrêt du côté de la presse en ligne.

Ø  Commençons par la Chine qui représente une expérience originale d’un pays qui prône l’ouverture et qui demeure dirigé par un parti unique, le parti communiste.

Ce qui fait l’intérêt de la Chine c’est qu’elle est l’une des grandes puissances émergentes contemporaines. Mais on dispose de peu de données sur cet immense pays. On peut , toutefois, signaler les agences de presse les plus célèbres comme l ‘agence chinoise Xin hua ( Chine nouvelle ) qui a été fondée en 1944 et qui est devenue une des principales agences internationales dans le monde. Fondé en 1952, Le service d’information de Chine destiné aux Chinois d’Outre-mer résidant à Hong Kong, à Macao ou à Taiwan, devient rapidement la 2ème agence de Chine. Il faut signaler qu’on relevait en 1950, déjà, l’existence de 250 journaux vendus à 400 millions d’exemplaires.

Suite à l’ouverture de la Chine en 1980, des mesures sont prises en vue de  promouvoir les mass media. La multiplication immédiate des titres qui s’en suivit témoigne du renouveau de ce secteur puisque l’on  note qu‘en 1999, par exemple,  la presse  chinoise ne publie pas moins de 20 milliards d’exemplaires !

En 1998, il existe déjà deux grands journaux : le Guangming Ribao ( le quotidien  du peuple ) qui est une édition publiée en direction de l’étranger  et le Jingji Ribao ( le quotidien de l’économie ).

Signalons, enfin, que la diffusion augmente de 8,5% en 2003, et sur cinq ans (1997-2002) de 30% [26]. Une croissance que ne connaît aucun autre pays.

Ø     La presse égyptienne, née  en 1860,  est  la    plus    ancienne  du   monde arabe. Avec une population évaluée, en 2003, à 72.000.000 habitants, le paysage médiatique y est dominé par cinq titres publics qui accaparent une part importante du lectorat. Le mythique  quotidien El Ahram  (les pyramides) et son non moins mythique directeur de la publication , Hassen Haykel, cavale en tête du peloton. Le journal cairote tire à 4 millions d’exemplaires, suivi de très loin  par El Goumhouria dont le tirage s’élève, comparativement,  à peine  à 200.000 exemplaires. El Ahram tire sa notoriété, entre autres, du fait qu’il a toujours été et demeure le passage obligé pour tout écrivain arabophone qui veut connaître la notoriété. Il a été classé à la 487ème place des 500 cents meilleurs sites de presse dans le monde.

Mais, face à ce poids ancien et lourd occupé par la presse publique dans le champ médiatique égyptien, la presse privée ne peut espérer  capter qu’un lectorat résiduel constitué par ceux qui critiquent cette presse officielle lui reprochant, à tort ou à raison,  son manque de professionnalisme, sa recherche du sensationnel, ses sources peu crédibles, et son manque de déontologie. Une autre population cible est constituée par les lecteurs qui préfèrent la presse de divertissement à l’image de la presse people  anglo-saxonne.

En se concentrant ainsi sur le ciblage du lectorat résiduel , elle commence à occuper progressivement une place conséquente  avec ses 900 titres spécialisés[27] dans le sport, le cinéma et autres faits de sociétés. Les nouveaux titres se multiplient au regard des facilités administratives  accordées par le Conseil suprême de la presse au lancement d’un titre. Ainsi les Egyptiens ont vu, durant les six premiers mois de 2005,  la parution de pas moins d’une dizaine de publications indépendantes[28].  On peut citer quelques titres tels que El Machahir, hebdomadaire réservé aux personnalités célèbres, El Helwa, hebdomadaire féminin qui tire entre 25.000 et 35.000 exemplaires[29]. Leur tirage est faible ou à peine moyen, leur publication est généralement hebdomadaires et régionale ; on décompte 22 mensuels régionaux parmi lesquels on peut citer Ouyoune  qui tire 40.000 exemplaires semaine.

Quant aux journaux privés  à vocation politique, ceux qui critiquent ouvertement le parti au pouvoir, El hizb el watani , citons El Masri El youm, quotidien qui ambitionne de pouvoir rivaliser avec la presse publique. Son objectif est de donner naissance à une presse crédible et viable . Son rédacteur en chef, Magdi El Galad, déclare[30]: Nous avons atteint un de nos objectifs qui est de gagner l’estime de l’élite. Nous visons en second lieu les lecteurs des gouvernorats et aussi la jeune génération qui a perdu confiance dans la presse officielle .

Citons le cas d’un autre journal privé El Doustour, un journal satirique d’opposition et premier journal indépendant créé en 1995, il a été provisoirement interdit ( …) A sa reparution son prix a doublé et sa distribution atteint les 100.000 exemplaires . Reparu avec un nouveau concept pour concurrencer le reste de la presse, El Doustour a conçu des pages politiques, faits divers, art, religion, espionnage, sport, sans oublier la page destinée aux jeunes et portant le titre : Coup de soleil. [31]

Ces nouveaux venus dans le paysage médiatique optent pour un style, inédit jusque-là,  qui consiste à dénoncer les maux sociaux tels que la corruption mais avec objectivité et sans passion. Ainsi, El Zayat  de El fagr  qui pense que la presse d’opposition est rejetée pour son ton excessif,  déclare : L’équipe maintient sa ligne éditoriale  et sa volonté de secouer et briser les tabous. Mais, cette fois, avec plus de recul et sans commentaires . Le lecteur est mûr pour faire, lui-même, la part des choses.


La presse en ligne

La presse en ligne est la dernière venue dans le paysage médiatique et semble  fermer la porte de l’histoire  de la presse ouverte, à l’aube de sa naissance, par le premier journal chinois le kai yuan tsa pao en l’an 0800.

L ‘histoire de celle-ci est récente, une dizaine d’années tout au plus, elle est l’expression de l’alliance entre le monde de la grande finance et les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC).

Dès 1994,  une trentaine de titres est mise en  ligne.  Le premier titre à se mettre en ligne est le célèbre quotidien suédois : Afton Bladet  suivi par le journal britannique : The Irish Times qui tente l’expérience. Très vite, Le Monde devient le premier site français généraliste de la presse écrite mis sur le web . Il a comptabilisé  6 millions de visiteurs en 2002. La pratique se généralise aux grands titres européens les plus dynamiques tels que la Republica en Italie , El Pais, en Espagne et The Guardian  et  Herald Tribune, en Grande Bretagne.

Au début des années 90, le débat sur l’utilisation des NTIC par la presse devient public. Ainsi, en France, le rapport Détailleur  en 1994, L’évolution de la presse écrite dans la perspective des multimédias , ainsi que le Rapport Bourdier, La presse et les médias, en  1997, arrivaient tous les deux  à la même conclusion : l’avenir de la presse passe par son développement sur le net et la télévision. Ces considérants et aussi l’euphorie de la découverte de la mise en ligne encouragent la majorité des journaux à se laisser entraîner par ce courant qui faisait très tendance. Celle-ci connaît alors une croissance fulgurante : en 2003, 79% des journaux ont leur propre site, contre 52% en 1998[32], ce qui représente 27% de croissance en cinq ans, ce qui est appréciable.

Mais force est de constater que cette croissance rapide et régulière de la mise en ligne s’est aujourd’hui stabilisée  et qu’elle ne semble même pas avoir obtenu tout le succès qui en était attendu. En 1996, les pertes sont évaluées à 85 millions   de $ pour le Washington Post , à 50 millions de $ pour le New York Times et à 10 millions de francs pour le Monde interactif.

Dés lors, une grande réflexion a été engagée pour tenter de trouver de nouvelles formes de financement en vue de maintenir et pérenniser cette forme futuriste de consultation de la presse car il apparaît clairement que sans services payants, les sites sont destinés à la disparition. De ce fait, il a été proposé de trouver des formules originales pour   diversifier les recettes permettant de les financer . Parmi celles-ci, il a été proposé d’utiliser  les recettes de la publicité du commerce électronique des produits et services (librairies, agences de voyage, information financière) ou l’introduction en bourse comme l’ont fait le New York Times, Sole 24 Ore ou Le Monde en 2001.

D’autres suggestions ont été avancées. Parmi celle-ci, on peut citer   le lancement de sites entièrement payants,  le paiement à l’acte de consultation comme le fait déjà  les Echos en France, le paiement selon la durée de consultation. Australian  a trouvé une formule consistant en la mise en ligne d’une version entièrement téléchargeable quotidiennement, avec une très forte réduction des prix par rapport à l’achat d’une version imprimée. Le Monde  a lancé une nouvelle édition payante réservée uniquement aux abonnés.

En outre, il a été constaté que, paradoxalement, la pratique du Web augmentait la lecture des magazines, ce qui permet aux quotidiens qui en éditent un  de multiplier leurs gains. Ainsi, un des sites de presse le plus prisé, surtout dans le domaine économique,  le Financial Times a été vu son site visité  par 55 millions de visiteurs  en janvier 2002. La consultation des articles les plus importants est payante. Beaucoup de quotidiens pensent s’engager dans cette voie.

Conclusion

Entre la pierre taillée et l’ordinateur, entre le messager et les réseaux numériques, il s’est écoulé 4000 ans seulement[33]. Si peu au regard de l’histoire de l’humanité.
           
Comparativement, entre le premier numéro du journal El Moudjahid publié en 1956  et aujourd’hui, il s’est écoulé tout juste 49 ans. Près d’un demi-siècle, à peine. C’est dire l’étendue de l’œuvre  qui a été accomplie mais aussi le chemin qu’il reste à parcourir.

Qu’en est-il, alors, du défi lancé par la presse publique à sa jeune sœur la presse privée de se maintenir à ses côtés, elle qui a participé à sa formation ?

Telle est la question à laquelle tentera de répondre la deuxième partie.

Nous achèverons cet historique en citant cette phrase de J.D. Wagneur  qui parle du journalisme comme étant   cette paradoxale activité qui consiste à recommencer à ses débuts tous les matins. Il rajoute avec amertume , le journalisme est un bagne d’où il ne s’évade qu’un ou deux forçats  tous les cent ans, et encore ceux-là sont-ils toujours marqués à l’épaule. [34]











































1. Jean François Bussière.  L’Histoire à la une : la grande aventure de la presse. Découverte/ Gallimard . 1989


[2] Pour une histoire comparatiste des médias. 14 Juin 2002 . Journées organisées par la Société pour l’histoire des médias 
[3] Bailly (C), De la gazette à Internet, les plus grands moments de la presse française. 
[4] Yannick Baulieu, La presse italienne, le pouvoir politique et l’autorité judiciaire durant le fascisme.. Université de Pau et des pays de l’Adour
[5] Célia Ribeiro Zaher,  l’histoire du Brésil à travers le journalisme, 67ème IFLA
[6] Les élites et la presse en Amérique Latine et en Espagne. Des lumières à la seconde guerre mondiale. Actes du colloques présentés par P.Aubert et  J. M. Desvois. Université de Provence. 
[7] Site Web : encyclopédie-encarta
[8] Idem
[9] Leveque (S) , Les journalistes sociaux, histoire et sociologie d’une spécialité journalistique, Presses universitaires de Rennes, 2 000
[10] Leveque (S), op.cit.
[11] Voir site Internet du SNJ.
12. KASPI (A) : les Etats Unis au temps de la prospérité. Ed. hachette,

 13 KASPI (A) : idem

14. Site WEB de l’AMJ
[15] Voir
15bis Roy Greenslade : How newspapers make profits from propaganda, Londres, 2003
[17] Institut National de la Démographie (France), 2004
[18] Etude publiée par l’Association Mondiale des Journaux (AMJ) en Juin 2003.
[19] CHALABY (J.C), Pour une histoire comparatiste des médias, l’analyse comparée en France et en Angleterre. Journées organisées par la Société pour l’Historie des Médias, le 14 Juin 2002. City university
[20] Patrick EVENO, Pour une histoire comparatiste des médias, l’analyse comparée en France et en Angleterre.  OP.cit.
[21] Loi organique du 1èr Août 2001 relative aux lois de finances.
[22] Site internet : actuamedia.fr
[23] Site internet de Publicis
[24] Les titres les plus renommés de la presse italienne sont, aujourd’hui, Le Corriere della sera , La Republica, La stampa, Il Mondo, Il Gazzelino, L’Espresso.

[25] Il aurait été souhaitable d’étudier un nombre plus importants de pays comme l’Inde par exemple, un autre pays émergent dont la presse est très dynamique, mais l’absence d’informations en Algérie sur ces pays a rendu cela impossible.
[26] Etude publiée par l’Association Mondiale des Journaux (AMJ) en Juin 2003.
[27] Journal El Watan, 26/7/05, Belagha (H)
[28] Article d’El Ahram publié par le Quotidien d’Oran le 14/07/05
[29] Idem, le 1 /9/05, Chahinaz Gheith
[30] Idem
[31] Idem
[32] AMJ : Op.cit.
[33] ALEXIS (M), Les médias, histoire de l’humanité. 1995, Version Web
[34] Wagneur (J.D),  Dossier de la petite presse. Site Web.